Cameroun; (Cardinal Christian Tumi) Dieu demandera à Paul Biya: «Qu’avez-vous fait du pouvoir que je vous ai confié?»
Posté par sdu le 27 octobre 2011
Yaoundé – 25 Octobre 2011
© Jean Claude Fogno | L’Actu
Alors qu’il a soufflé sur sa 81e bougie le 15 octobre dernier, Mgr Tumi refuse toujours de se taire. Le célèbre prélat exprime ici sa profonde déception par rapport au scrutin présidentiel du 9 octobre dernier au Cameroun, tout en s’insurgeant contre le recours à la violence et à la communauté internationale
Alors qu’il a soufflé sur sa 81e bougie le 15 octobre dernier, Mgr Tumi refuse toujours de se taire. Il se situe résolument dans le sillage de ce qu’Alain Didier Olinga soulignait dans son livre Propos sur l’inertie paru en 2009 : «L’état de notre société actuelle accule l’intellectuel, au sens propre du terme, au moins à la parole éclairante». Le célèbre prélat, auteur de l’essai Les deux régimes politiques d’Ahmadou Ahidjo, de Paul Biya et Christian Tumi, a bien voulu se confier à L’Actu. Il exprime ici sa profonde déception par rapport au scrutin présidentiel du 9 octobre dernier au Cameroun, tout en s’insurgeant contre le recours à la violence et à la communauté internationale et en mettant en garde le régime en place contre le tribalisme et les manœuvres anticonstitutionnelles de succession.
Paul Biya a ignoré votre souhait de le voir quitter le pouvoir. Voyez-vous en lui un pouvoiriste ou un chef d’Etat pris en otage par certaines puissances qu’il ne maitrise pas?
Je ne le prends pas pour quoi que ce soit. J’ai dit que si j’étais Biya je ne serai pas candidat à la présidence de la République. Mais, si son parti le propose aux Camerounais et que par une élection véritablement transparente, ceux-ci l’acceptent comme président, ce n’est pas un problème pour moi.
Croyez-vous à cette litanie d’appel du peuple?
Non, je ne crois pas à ce genre de chose. C’est quelques élites qui s’enferment pour rédiger ces motions d’appel à candidatures et de soutien. A mon avis, cela pose un problème moral.
Qu’est-ce qui justifie cet entêtement du régime, les jeux d’intérêt ou la peur des lendemains?
Je ne peux pas lire sa pensée. Après 30 ans, il aurait dû quitter. Quelqu’un d’autre peut faire la même chose mais d’une autre manière. L’essentiel, c’est le développement du pays avec une approche différente.
Continuez-vous d’affirmer que depuis 30 ans, il n’y a pas eu d’élections au Cameroun?
C’est depuis 50 ans. Depuis l’indépendance. Même au temps de parti unique, il n’y a jamais eu d’élections au Cameroun parce qu’on proclamait les résultats avant même de faire les décomptes. Le règne Biya se situe dans la même logique. Je croyais que ces élections du 9 octobre dernier pouvaient être un peu transparentes et acceptables, mais je suis déçu.
Ce scrutin a mobilisé 23 candidats. Qu’est-ce qui explique cette course à la magistrature suprême?
23 candidats ne sont pas beaucoup. Nous avons plus de 200 partis politiques (Ndlr: 260) et chaque parti a la possibilité de désigner son candidat. Je m’attendais à au moins 200 candidats. Dans un pays sérieux, une bonne culture démocratique se voit avec trois ou quatre partis politiques. Vous allez voir après la proclamation de résultats que seulement trois ou quatre formations politiques vont émerger du lot.
Pourquoi êtes vous resté sourd à l’appel du peuple (le vrai) appuyé par plusieurs formations politiques qui étaient transpercées par l’espoir de vous voir provoquer enfin une vraie alternance au sommet de l’Etat cette année?
Je ne m’intéresse pas à la vie politique de mon pays. Je dis à mes chrétiens que si j’étais un laïc, soit je fonderais un parti politique, soit je militerais clans un parti de mon choix. Dans l’église catholique, le pasteur ne doit pas militer de peur de voir le peuple de Dieu divisé.
Si j’étais laïc, je ne sais pas si les gens vont courir chez moi comme ils le font maintenant avec mon statut de pasteur. Quand j’étais ordonné prêtre en 1966, j’ai décidé de ne jamais participer à une activité politique et je ne l’ai jamais fait jusqu’à nos jours. Si les partis politiques organisent leurs réunions et m’invitent, je pourrais y assister sans prendre parole et sans me prononcer. Ce n’est pas ma vocation.
Cette prise de position n’entre-elle pas en contradiction avec votre soutien à l’Offre Orange en tant que préfacier de l’ouvrage de Hilaire Kamga qui dénote clairement les options de prise de pouvoir au Cameroun?
Je peux préfacer n’importe quel livre. Je ne le proposais pas candidat à la magistrature suprême. Je viens de préfacer le livre d’un autre jeune Camerounais. Surtout qu’on ne reprend que ce que l’auteur a dit j’ai eu le temps de lire le livre de Kamga et c’est un jeune dynamique qui a des ambitions et des idées pour son pays. Je comprends mon Cameroun où les gens ne sont pas habitués à analyser les choses comme il se doit. C’est alors que le pouvoir a sa vérité et l’opposition a la sienne ainsi que l’homme du quartier.
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